
Article par :
Johan Sebastian Villa
Depuis le 1er octobre 2025, la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail transforme la manière dont la prévention en santé et sécurité du travail est organisée au Québec.[1] Elle oblige désormais les entreprises à adopter un programme de prévention ou un plan d’action qui tienne compte non seulement des risques physiques, mais également des risques psychosociaux susceptibles d’affecter les travailleurs.
-
Établissement de 20 travailleurs et plus : le programme de prévention
Tout établissement regroupant au moins 20 travailleurs doit élaborer, appliquer et maintenir un programme de prévention adapté à ses activités.[2] Il a pour objectif d’éliminer les dangers à la source et d’assurer la protection de la santé, de la sécurité et de l’intégrité physique et psychique des travailleurs.
Ce programme de prévention doit tenir compte des programmes de santé au travail élaborés par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) en collaboration avec le ministre de la Santé et des Services sociaux, des règlements applicables à l’établissement ainsi que, le cas échéant, des recommandations du comité de santé et de sécurité et prévoir notamment :[3]
- l’identification et l’analyse de tous les risques pouvant affecter la santé ou la sécurité des travailleurs, qu’ils soient chimiques, biologiques, physiques, ergonomiques et psychosociaux liés au travail;
- les mesures et les priorités d’action visant à éliminer ou, à défaut, à contrôler ces risques, en respectant la hiérarchie des mesures de prévention établie par règlement et en précisant les échéanciers pour leur mise en œuvre;
- les mesures de surveillance, d’évaluation, d’entretien et de suivi permettant de s’assurer que les risques identifiés sont éliminés ou contrôlés;
- l’identification des moyens et des équipements de protection individuels conformes aux règlements et les mieux adaptés aux besoins des travailleurs;
- les programmes de formation et d’information en matière de santé et de sécurité du travail;
- les examens de santé préalables à l’embauche et ceux exigés en cours d’emploi;
- l’établissement et la mise à jour d’une liste des matières dangereuses utilisées dans l’établissement et des contaminants qui peuvent y être émis; et
- le maintien d’un service adéquat de premiers soins pour répondre aux urgences.
L’employeur doit transmettre à la CNESST, tous les trois (3) ans, les priorités d’action de son programme de prévention, l’état d’avancement des mesures prévues ainsi que le suivi des mesures mises en place pour éliminer et contrôler les risques identifiés.[4] La CNESST peut également, dans le délai qu’elle détermine, exiger la transmission ou la modification d’un programme de prévention. Le programme ainsi modifié doit être transmis au comité de santé et de sécurité, à l’association accréditée et au représentant en santé et en sécurité.[5]
L’élaboration du programme de prévention se fait en collaboration avec le comité de santé et de sécurité[6] et avec le représentant en santé et sécurité[7], favorisant ainsi une approche participative et concertée en milieu de travail.[8]
- Établissement de 19 travailleurs ou moins : plan d’action
Les établissements comptant 19 travailleurs ou moins doivent élaborer et mettre en œuvre un plan d’action, dont l’objectif est similaire à celui du programme de prévention, mais adapté à la réalité des plus petites structures.[9]
Ce plan doit tenir compte des programmes de santé au travail et des règlements applicables à l’établissement. Il doit notamment prévoir :[10]
- l’identification des risques pouvant affecter la santé et la sécurité des travailleurs, dont les risques chimiques, biologiques, physiques, ergonomiques et psychosociaux liés au travail;
- les mesures et priorités d’action visant à éliminer ou, à défaut, à contrôler ces risques, en respectant la hiérarchie des mesures de prévention établie par règlement et en précisant les échéanciers pour leur mise en œuvre;
- les mesures de surveillance et d’entretien permettant de s’assurer que les risques identifiés sont éliminés ou contrôlés;
- l’identification des moyens et des équipements de protection individuels conformes aux règlements et les mieux adaptés aux besoins des travailleurs; et
- la formation et l’information en matière de santé et de sécurité du travail.
Les établissements comptant 19 travailleurs ou moins et ceux n’ayant pas l’obligation de désigner un représentant en santé et en sécurité doivent désigner un agent de liaison en santé et sécurité.[11] Ce dernier collabore à l’élaboration et à la mise en œuvre du plan d’action en formulant des recommandations écrites à l’employeur, lequel doit y répondre dans un délai de 30 jours.Cette mesure assure une participation des travailleurs même dans les établissements de plus petite taille, où il n’existe pas de comité de santé et de sécurité ni de représentant en santé et sécurité.
- Les risques psychosociaux : une reconnaissance légale renforcée
La réforme marque un tournant dans la façon dont les entreprises doivent envisager la santé et la sécurité du travail. Les risques psychosociaux doivent dorénavant être identifiés, analysés et pris en compte dans le cadre du programme de prévention ou du plan d’action, au même titre que les dangers physiques ou chimiques.
Ces risques comprennent notamment le stress, la surcharge de travail, le manque de reconnaissance, le harcèlement, la violence à caractère sexuel, ainsi que d’autres facteurs pouvant nuire à la santé psychologique des travailleurs.
En les plaçant au cœur des obligations de prévention, le législateur reconnait que le bien-être mental constitue désormais une composante essentielle de la santé et sécurité au travail.
Cet aperçu couvre les grandes lignes de la réforme. D’autres aspects, comme les règles applicables aux entreprises comptant plusieurs établissements, le rôle du comité de santé et de sécurité et des représentants en santé et sécurité, ou encore, la création d’un registre des contaminants et des matières dangereuses, sont détaillés plus amplement dans la Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail.
Vous avez des questions? Communiquez avec notre équipe de professionnels en droit du travail!
[1] Décret 1154-2025;
[2] Art. 58, 58.1 Loi sur la santé et la sécurité du travail;
[3] Art. 59 Loi sur la santé et la sécurité du travail;
[4] Art. 60 Loi sur la santé et la sécurité du travail;
[5] Art. 61 Loi sur la santé et la sécurité du travail;
[6] Art. 68, 68.1, 68.2, 70, 74, 78 et 78.1 Loi sur la santé et la sécurité du travail;
[7] Art. 87, 87.1, 88, 88.1, 90, 91, 92 Loi sur la santé et la sécurité du travail;
[8] Décret 1155-2025; Règlement sur les mécanismes de prévention et de participation en établissement;
[9] Art. 61.1 Loi sur la santé et la sécurité du travail;
[10] Art. 61.2 et 107 Loi sur la santé et la sécurité du travail;
[11] Art. 97.1, 97.2, 97.3, 97.4 et 97.5 Loi sur la santé et la sécurité du travail.