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Québec municipal

Influence ou tentative d’influence, quels sont les principes à retenir pour éviter tout manquement ?

Par : Tanguay, Yanick

21 septembre 2023

Toutes les municipalités du Québec1 doivent adopter un code d’éthique et de déontologie qui stipule une règle interdisant à tout membre d’un conseil de la municipalité de se prévaloir de sa fonction pour influencer ou tenter d’influencer la décision d’une autre personne de façon à favoriser ses intérêts personnels ou, d’une manière abusive, ceux de toute autre personne.2

La Commission municipale du Québec s’est penchée à diverses reprises sur des manquements allégués à cette règle par des élus municipaux. Chaque situation étant unique et pour permettre aux élus municipaux de s’y retrouver, nous proposons une brève revue des décisions récentes en la matière afin de recenser les critères appliqués par la Commission.

Tout d’abord, la preuve qui doit être faite devant la Commission pour démontrer un manquement d’un élu à cette règle est essentiellement constituée des éléments suivants :

  • la personne doit être membre du conseil municipal au moment des faits reprochés;
  • la personne doit se prévaloir de sa fonction pour influencer ou tenter d’influencer la décision d’un tiers;
  • la personne doit chercher à favoriser ses intérêts personnels ou, d’une manière abusive, ceux de toute autre personne3.

Dans le cadre de son évaluation de la preuve, la Commission doit examiner le comportement qui est reproché à l’élu et se demander si une personne raisonnablement informée en viendrait à la conclusion que celui-ci a manqué à ses obligations déontologiques4.

L’intérêt doit être distinct de l’intérêt général et il peut être pécuniaire ou non5.

Il importe de préciser qu’il n’est pas exigé qu’il soit démontré que l’intervention de l’élu municipal ait effectivement influencé la décision de toute autre personne. En effet, il peut y avoir manquement tant pour le cas où le tiers serait effectivement influencé que pour une tentative d’influence6.

Cette règle n’exige pas non plus que l’élu agisse dans l’exercice ou dans le cadre de ses fonctions au moment où il a commis les actes qui lui sont reprochés7.

La preuve devra cependant démontrer que l’élu est intervenu de façon active et délibérée dans le but de favoriser ses intérêts personnels ou, de manière abusive, ceux d’un tiers, et qu’elle a influencé ou tenté d’influencer une décision. La seule présence de l’élu lors de discussions ou de délibérations ne sera généralement pas une preuve suffisante d’un manquement à la règle8.

La règle n’interdit cependant pas à un élu d’intervenir complètement auprès de l’administration municipale. Ce qui lui est interdit, c’est de se prévaloir de sa fonction d’élu municipal pour obtenir une décision qui lui est favorable, par un moyen qui n’est pas à la portée des non-élus. Pour contrevenir à son code d’éthique et de déontologie, l’élu doit utiliser son statut de façon illégitime pour se favoriser ou favoriser un tiers9.

Un comportement qui n’a aucun lien ni aucune pertinence avec les affaires de la municipalité, qui n’est pas inhérent à la charge d’élu municipal et qui ne découle pas de l’exercice de celle-ci, ne sera généralement pas considéré comme étant un manquement à la règle. La Commission distingue les comportements imprudents des manquements répréhensibles10.

La Commission rappelle d’ailleurs, dans une décision récente, qu’un élu se doit d’agir avec prudence lorsqu’il tient des propos dans lesquels il fait référence, même de manière indirecte, à ses fonctions d’élu ou de politicien11.

La perception qu’a le public de l’intégrité de la municipalité étant tributaire en grande partie du comportement de ses élus, ces derniers se doivent d’agir avec la plus grande des prudences et prendre le temps de se positionner dans le rôle de la personne raisonnablement informée pour se questionner sur les conséquences potentielles d’un comportement ou d’une décision. Ils s’éviteront ainsi bien des désagréments qui viennent avec une enquête de la Commission.


1 Sauf les villages nordiques, cris ou naskapis, les municipalités dont le conseil, selon leur loi constitutive, n’est pas formé de personnes élues par ses citoyens et les municipalités régionales de comté dont le préfet est élu au suffrage universel (Loi sur l’éthique et la déontologie en matière municipale, RLRQ c. E-15.1.0.1, art. 2).

2 Loi sur l’éthique et la déontologie en matière municipale, RLRQ c. E-15.1.0.1, art. 6 (2).

3 CMQ-65505

4 CMQ-65505

5 CMQ-66454, CMQ-65452

6 CMQ-65505

7 CMQ-65505

8 CMQ-66046

9 CMQ-65624

10 CMQ-65688

11 CMQ-65688